Noémie et Rosco, une complicité à toutes épreuves

Dog & Lifestyle a rencontré Noémie Ranvin, fondatrice des Tri’Pattes, une communauté pour propriétaires de chiens amputés. Elle nous parle de son histoire émouvante mais chaleureuse avec Rosco aujourd’hui amputé mais toujours vaillant.

Présentez-nous Rosco. Qui est-t-il ?

C’est un Border Collie mâle de 15 ans et demi. On a conscience d’avoir atteint un âge plutôt rare. Du coup, on profite encore plus de chaque moment.

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Comment est-il entré dans votre vie ?

Cela a démarré de façon plutôt amusante. Plus jeune, j’avais toujours rêvé d’avoir un chien. Mais mes deux parents travaillaient, et il était difficilement envisageable d’en avoir un, si c’était pour le laisser seul à la maison toute la journée. Puis, nous sommes partis en vacances. Dans le logement voisin de notre location se trouvait un super chien : sa maîtresse déposait des bidons de lait au coin de la rue et son chien les gardait ensuite jusqu’à l’arrivée du camion de collecte, puis rentrait chez lui. J’ai été épatée de voir qu’on pouvait dresser un chien ainsi. En rentrant, je me suis renseignée sur la race, j’ai découvert le Border Collie et je suis tombée sous le charme. J’ai tellement insisté que mon père a fini par craquer. Nous avons cherché un éleveur car nous voulions un chien LOF. Mon père voulait un mâle. Nous habitons dans le Nord de la France et nous sommes allés chercher Rosco à Limoges. J’allais avoir quatorze ans. Et depuis il m’accompagne.

Pourquoi votre chien est-il si spécial ? Quelles sont ses 3 plus grandes qualités ?

Difficile de n’en trouver que trois ! Il a un caractère fort et je pense que c’est cette force qui l’a aidé à surmonter toutes les épreuves et probablement le secret de sa longévité. Il ne se laisse pas abattre. Il est intelligent et apprend vite.

Et son plus gros défaut ?

Il se met à aboyer quand le téléphone sonne. Je pense qu’il anticipe le fait qu’on va se désintéresser de lui pendant la conversation dans le combiné et cela ne lui plaît pas. Par contre, étonnamment, il a très bien accepté l’arrivée de mon bébé.

Quelles activités pratiquiez-vous avec lui ?

En fait, j’ai pris des leçons d’éducation avec Rosco et dans le club, il y avait aussi des cours d’agility. Ça m’a tenté. Nous avons essayé, nous nous sommes pris au jeu et cela a renforcé notre lien de complicité et d’amitié. On a fait de la compétition jusqu’à être classés.

Et l’accident ?

Un jour d’entraînement, Rosco saute comme d’habitude mais fait une mauvaise réception sur sa patte arrière et son ligament s’est rompu. On a dû l’opérer mais il y a eu des complications. Au moment du contrôle post-chirurgical, on m’a dit que sa patte était foutue. Je n’ai d’abord pas voulu y croire. Je suis allée voir d’autres vétérinaires pour avoir d’autres avis mais tous m’ont confirmé que l’amputation était la seule solution.

Comment avez-vous fait pour accepter la situation ?

J’ai regardé mon chien : entre le moment de l’annonce et l’amputation elle-même, Rosco a beaucoup souffert, sa patte se nécrosait. Lorsque j’ai récupéré mon chien qui n’avait plus que trois pattes, je me suis fait à l’idée car j’ai vu que c’était finalement un soulagement pour Rosco : il ne souffrait plus et était content de me voir. Ce n’était pas sa patte qui lui manquait, c’était moi. Avec trois ou quatre pattes il était finalement heureux de me retrouver. J’ai été beaucoup inspirée également par la réaction de notre deuxième chien, Despé, un autre Border Collie mâle de sept ans qui a gardé le même comportement vis-à-vis de Rosco avant et après l’amputation : pas de discrimination chez les chiens. Une jolie leçon.

Que s’est-il passé ensuite ?

Bien sûr l’agility c’était terminé car il n’y pas de compétition d’agility pour les chiens handicapés. Je ne voyais plus mes amis du club. Bref, je me sentais exclue parce que j’avais un chien handicapé. Quand nous sortions dans la rue, tout le monde nous dévisageait. Ce n’était pas facile au début. Et pourtant j’avais retrouvé le Rosco d’avant : il courait comme un fou, nous faisions de grandes balades.

Votre chien est aujourd’hui appareillé ?

Oui. Lors de l’amputation, Rosco avait déjà neuf ans. Au bout d’un an, ses pattes avant, sur lesquelles il forçait davantage pour s’équilibrer ont commencé à se déformer. Malgré les anti-inflammatoires, on s’est aperçu qu’il commençait à avoir du mal à se mouvoir correctement. On a d’abord pensé à la solution d’une prothèse. A l’époque, c’était assez rare en France. Je me suis tournée vers un spécialiste au Canada qui nous a expliqué que la hauteur de l’amputation ne permettrait pas la pose d’une prothèse. On alors pensé au chariot. Avant de faire l’acquisition d’un appareil somme toute assez onéreux, mon père en a bricolé un. Ce ne fut pas une réussite : Rosco ne l’a pas supporté du tout.
Avec l’expérience, j’ai appris que tout chien à qui l’on pose un chariot a toujours une période de blocage : il se demande ce que c’est et pourquoi cette chose le suit partout. A l’inverse d’un humain à qui on peut expliquer les choses, avec le chien il faut apprendre de nouveaux gestes. Nous avons donc entamé une deuxième vie où nous avons réappris ensemble les bases.

La nouvelle situation de Rosco a-t-elle nécessité la mise en place de soins particuliers ?

Aujourd’hui, je suis assistante vétérinaire. Cela m’a permis de me former à l’école vétérinaire de Maisons-Alfort aux techniques de massage et à l’électro-stimulation pour détendre et stimuler ses muscles. Il est aussi suivi par un vétérinaire ostéopathe. A chaque retour de séance, il retrouve la forme et un confort articulaire et musculaire évident. Même pour un chien à quatre pattes, je ne peux que conseiller l’ostéopathie pour accompagner un animal senior.

Rosco porte-t-il son chariot en permanence ?

Non, surtout pas. Le chariot est là pour le soulager quand il va dehors. A l’intérieur d’une maison, c’est quasiment impossible. Il y a toujours un obstacle dans lequel il risquerait de bloquer son chariot. Ou alors s’il cherche à s’asseoir, il risque de prendre de mauvaises postures. Je lui mets le chariot au moment de son repas : cela l’aide à se tenir debout et à manger correctement. Mais le chariot sert principalement pour les balades.

Comment se comportent les gens autour de vous à la vue de votre chien ?

Les amis proches ont fini par accepter, comme moi. Dans la rue par contre, il y deux types de réaction : ceux qui viennent nous voir pour me demander ce qu’il lui est arrivé, et ceux qui nous regardent bizarrement comme si nous étions des pestiférés.

Est-ce cette méconnaissance qui vous a incitée à créer la communauté des Tri’pattes ?

Oui. Suite à l’amputation, je me suis retrouvée seule : je n’avais personne autour de moi dans la même situation, avec qui j’aurais pu échanger. J’ai donc décidé de créer cette communauté pour ne pas que d’autres personnes se trouvent aussi désemparées que je l’ai été. Lancée il y a deux ans, cette communauté est un espace d’échanges, de partage d’expériences. C’est aussi un outil pour relayer les annonces de chiens amputés et proposés à l’adoption dans les différentes associations, SPA et refuges en France. A travers les liens qui se sont créés entre les membres de la communauté, nous nous sommes constitués une nouvelle famille autour de cette particularité. Mon mari, qui est vétérinaire, y intervient pour les questions d’ordre médical. J’apporte aussi mon expérience sur les différents types de chariot.

Un effet inattendu de la création des Tri’pattes ?

Aujourd’hui des vétérinaires prennent aussi contact avec moi. Le handicap chez le chien est un sujet encore assez tabou et les vétérinaires se trouvent parfois un peu démunis, d’autant plus que leur formation initiale ne prend pas vraiment en compte cette dimension. Nous échangeons donc sur des cas précis. Je suis plutôt fière de me dire que grâce à Rosco qui est, et restera, notre mascotte, nous réussissons à faire un peu avancer les choses auprès du grand public et auprès des professionnels.

Votre dernier coup de cœur ?

C’est lorsque je vois des membres de la communauté continuer à avoir une activité normale avec un leur chien amputé. Rosco était déjà âgé lors de l’opération, donc son état s’est dégradé un peu plus vite. Mais certains maîtres autour de moi, dont le chien a été amputé jeune, continuent à faire du cani-cross ou de l’obérythmée. C’est génial, non ?

Un grand merci à Noémie pour son enthousiasme communicatif et son travail à travers la communauté des Tri’pattes. 
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One comment

  1. J’aime beaucoup l’histoire de ce beau toutou.
    On apprend toujours des « aventures » des autres qu’elles soient belles ou difficiles.

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